La Maison Rouge
– partie 1/2
6 avril 2020, par Remy
Les vilains petits canards ont aussi leur mot à dire :
2ème épisode (partie 1/2)
Dans un précédent article, j’avais évoqué la tour Valentin-Sorg, bâtiment iconique de l’hyper-centre de Strasbourg, quand bien même il ne fait pas l’unanimité (loin de là !) auprès des Strasbourgeois. Aujourd’hui, nous allons nous intéresser à un autre de ces bâtiments décriés : la Maison Rouge.
Hasard, coïncidence ou complot, ce petit centre commercial à l’aspect daté, ayant pignon sur rue en pleine place Kléber, se situe à deux pas de la tour citée plus haut. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il ne laisse personne indifférent lui non plus !
Cependant, avant de prendre la défense de cet opprimé-ci, il me faut remonter loin dans le temps, au XIIIème siècle plus exactement, pour vous faire découvrir la longue et incroyable histoire de cet emplacement.
Aux origines
Tout commence en 1253 avec le Stadelhof, un petit hôtel, qui grandira au long des siècles en absorbant les bâtiments adjacents, notamment vers 1500 puis en 1789. La première mention de “Maison Rouge” date quant à elle de 1387 : l’hôtel se nomme alors “Zu dem Rothen Huse”.
Enfin, en 1825, l’hôtel atteint sa taille maximale : le voilà composé de cinq maisons, mais le bâtiment n’est pas encore unifié derrière une seule façade. Pour cela, il faudra attendre 1860 !
Entre temps, il aura eu droit en 1839 à la visite d’un artiste de renom : Victor Hugo.
Un nouvel élan
En 1879, un nouveau propriétaire entre dans la danse. En 1892, il effectue une demande de permis de construire pour son grand projet : tout détruire pour reconstruire un édifice dans l’air du temps. Dans un univers parallèle, peut-être ce bâtiment existe-t-il toujours ? Dans notre monde, en tout cas, il ne verra même pas le jour. C’est toutefois à cette époque que l’ensemble des bâtiments prend le nom d’Hôtel de la Maison Rouge.
En 1897, on y organise l’une des premières projections cinématographiques à Strasbourg. L’année suivante, hélas, est de plus sinistre mémoire : un incendie endommage l’hôtel. C’est l’occasion de lancer, au tournant du siècle, les premiers grands travaux. Ceux-ci s’accompagneront d’une nouvelle façade restée dans les mémoires. Autre signe des temps : on équipe l’hôtel d’un ascenseur.
L’hôtel survit à deux guerres et entre dans le monde moderne
En 1915, un obus tombe sur l’hôtel. La légende voudrait que des éclats en subsistent ici et là dans les murs des salons. C’est en tout cas ce qui se raconte pendant quelques années. Vrai ou pas, voilà une histoire à même de divertir les hôtes.
En 1941, on y aménage un abri anti-aérien à même d’accueillir 150 personnes. En 1944, un nouvel obus tombe sur le pauvre hôtel qui n’en demandait pas tant…
Pour l’anecdote et pour bien apprécier les différences de standing avec l’époque, notons que jusqu’en 1945, les chambres ne sont équipées que d’un lavabo et d’un pot de chambre !
Un incendie fatal
Après guerre, la vie de l’hôtel reprend son cours. Au cours des vingt-cinq années qui vont suivre, il changera plusieurs fois de nom. Peut-être trouverez d’ailleurs encore en ville des sexagénaires qui vous parleront avec émotion du Bar Dancing Ambassadeur. L’auteur de ces lignes n’était malheureusement pas encore né et ne pourra donc pas l’évoquer de vive voix… Il semblerait cependant que c’était un haut lieu de la vie nocturne strasbourgeoise, et assez select en plus de ça !
Puis arrive la date fatidique de 1970. Un nouvel incendie frappe l’hôtel, probablement causé par le système électrique vétuste. Cette fois-ci, le vénérable établissement ne s’en remettra pas et l’activité hôtelière cessera une bonne fois pour toute en décembre de cette année-là.
Les Strasbourgeois pourront effectuer un ultime pèlerinage en ses murs en 1972, à l’occasion d’une Foire du Livre de Poche.
Voici qui conclut la genèse de la Maison Rouge actuelle ! Au programme du prochain épisode : une lutte âpre pour la sauvegarde du patrimoine, un changement total d’ambiance et les prédictions de notre diseuse de bonne aventure quant à l’avenir du lieu.
D’ici là et si l’impatience est trop forte, n’hésitez pas à vous joindre à l’un de nos Free Tours pour découvrir d’autres bâtiments de la ville, tout aussi intéressants mais probablement moins sujets à la polémique 😉